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Député wallon et de la Fédération Wallonie-Bruxelles

Le blocage persistant entre la Région wallonne et la Ville d'Arlon dans le projet de vente du domaine de Viroinval

Madame la Ministre, en juin dernier, nous étions quelques collègues luxembourgeois à vous interroger au sujet de la vente du domaine du Risque-Tout à Viroinval par la Commune d’Arlon. Malgré le fait que le point avait été validé au conseil communal, la commune ne souhaitait plus vendre le domaine à cause de l’importante différence entre le prix d’achat proposé par la Région et une estimation réalisée par ses soins ultérieurement. Là où la Région wallonne proposait 4,6 millions d’euros, la commune estimait désormais la valeur du domaine à 8,6 millions d’euros. Dès lors, le DNF, le comité d’acquisition et la Ville d’Arlon ont renégocié la valeur du domaine forestier de Viroinval. La commune accepte désormais de l’acheter à 6 millions d’euros, soit 1,75 million de plus que la première offre, mais toujours 2 millions en dessous de l’estimation de l’expert forestier mandaté par la Ville d’Arlon. L’ancien directeur général du DNF a, quant à lui, proposé une estimation aux alentours de 7,2 millions, se proposant même comme médiateur. Cette estimation n’a, semble-t-il, pas été validée par la Région. Aujourd’hui, les négociations sont, selon la presse, au point mort, et le désaccord sur la valeur du domaine persiste. Rappelons au passage l’objectif initial de cette vente qui est la création d’une réserve naturelle domaniale qui serait un véritable plus pour la biodiversité. Vous annonciez qu’après réception des deux estimations, celle de la ville et celle du DNF, vous demanderiez à vos services un rapport conjoint avec le comité d’acquisition qui se pencherait sur le volume et la valeur du bois, ainsi que sur les hypothèses qui sous- tendent les estimations des deux parties. Ce rapport a-t- il été réalisé et surtout, qu’indique-t-il ? Suite à une réévaluation de votre administration, l’offre de la Région a été majorée de près de 1,75 million d’euros. Comment cette nouvelle estimation a-t-elle été réalisée ? Comment expliquer la différence entre les deux estimations ? Malgré cette réévaluation, la commune a exprimé son refus de vendre. Cependant, le point avait été valablement voté au conseil communal. La Région serait donc en droit de réclamer la poursuite du processus de vente. Selon la presse, toutefois, vous auriez validé l’abandon du projet de vente. Le confirmez-vous ? Cela met-il un terme au projet de création d’une réserve naturelle dans ce domaine, ce qui constitue un des points essentiels du point de vue de la Région ?

Réponse

Mme Tellier , Ministre de l’Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal. – Monsieur le Député, comme vous, je regrette que ce projet ambitieux de création d’une réserve naturelle de quelque 350 hectares ait autant de mal à se concrétiser. Je suis également préoccupée des tensions induites par ce dossier entre la Ville d’Arlon, le comité d’acquisition et les services du DNF. Dans le cadre de l’estimation d’une propriété comme celle-ci, deux données principales doivent être analysées : la valeur de fond, c’est-à-dire la valeur du terrain nu et la valeur des arbres présents sur ce terrain. Concernant la valeur de fond, celle-ci se fait par comparaison avec d’autres ventes similaires réalisées dans la Région. C’est le premier point de divergence entre les deux expertises. Le comité d’acquisition, dans PW – Session 2023-2024 – CRIC n° 8 – Environnement – Mardi 12 septembre 2023 2 sa nouvelle estimation, a revu celle-ci à la hausse, mais sans pour autant atteindre celle de l’expert privé qui s’est basé sur une seule vente récente qui a fait l’objet d’une concurrence acharnée entre deux acheteurs et qui ne reflète pas un prix réel, mais un prix obtenu. Sur la valeur de fond, le comité d’acquisition a mis à jour son estimation qui datait de plus d’un an. Les dernières ventes de la région ayant montré une certaine tendance à la hausse, celui-ci s’est aligné, mais il ne peut objectivement pas atteindre le prix proposé par l’expert privé. Concernant la valeur des bois, l’estimation se déroule en deux phases : d’abord, une estimation du type et du volume de bois présents sur la propriété ; ensuite, l’attribution d’une valeur marchande à ces différentes catégories de bois. Le DNF a analysé les deux rapports et a relevé une erreur de quelque 13 250 mètres cubes dans l’estimation des gros bois résineux réalisée par l’expert privé. Cette erreur conduit, toute chose restant égale, à une surestimation objective et indiscutable de la valeur des bois de 1 060 500 euros. Deux éléments principaux expliquent la nouvelle estimation du DNF pour la valeur des bois : - une valeur de ces bois augmentée pour les résineux, passant de 70 euros par mètre cube à 75 euros par mètre cube, pas par rapport à la première estimation ; - une diminution de l’évaluation du risque de dégradation de cette valeur pour des questions sanitaires ou de marché. Soulignons que la forêt en question a été victime d’attaques de scolytes et que le risque à ce sujet est bien présent. Sur ces deux points, il importe de comprendre que la Région a fait un pas important vers la Ville d’Arlon en acceptant d’assumer elle-même un double risque : d’une part, le maintien sur le long terme de la valeur du bois d’épicéa et, d’autre part, les risques sanitaires. Sur base de la seconde estimation du comité d’acquisition, une offre définitive de 6 340 000 euros a été remise à la commune. Elle diffère en cela de celle de l’expert privé, mais qui contient au minimum une erreur d’évaluation objective et indiscutable des bois sur pied de plus de 1 million d’euros et une surévaluation de la valeur de fond. L’expert privé ne prend pas non plus en compte le risque sanitaire et retient des prix unitaires très optimistes, supérieurs à ceux du DNF. Il est évident que nous n’allons pas contraindre la Ville d’Arlon à vendre sa propriété si elle ne le souhaite pas. Cela n’aurait pas de sens. Il me semble néanmoins que cette nouvelle évaluation par les services de la Région était une offre sérieuse qui aurait pu faire l’objet d’un accord. Je terminerai en réitérant ma confiance en mon administration qui a, à nouveau, fait preuve d’un grand professionnalisme dans le cadre de ce dossier.

Réplique

Merci pour ces réponses détaillées. Très clairement, la Région s’est montrée ouverte. Vous venez de détailler ce qui explique la différence entre les deux évaluations faites par la Région, notamment la mise à jour par rapport au prix du marché du bois, ce qui explique la deuxième proposition faite par la Région. Comme vous, contrairement à ce qui a pu parfois percer dans les commentaires des uns et des autres, je pense que la Région a travaillé en transparence, mais également en grande honnêteté. Je regrette comme vous que la constitution d’une réserve naturelle ne puisse se réaliser. C’est le plus gros regret dans ce dossier. Arlon ne souhaitant plus vendre, on ne peut que s’y conformer. RAPPEL AU RÈGLEMENT

Date de la question parlementaire
Ministre
Céline Tellier

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